ALBINI, MALDOROR ET MOI :

Il y a 30 ans, je revenais d'Amsterdam où j'ai résidé trois années. J'ai beaucoup appris là-bas : être immigré en sous-sous location, danser dans les clubs gay de Warmoesstraat, me branler frénétiquement dans les peep-shows en lisant Le Démon de Selby et accessoirement, je niquais avec deux allemandes arty (une vidéaste et une danseuse) qui me poussaient à écrire, ce que je fis humblement dans un bar d'un hôtel du Quartier Rouge, le Winston. C'était juste pour ne pas me brouiller avec elles, je préférais boire au Vondelpark et jouer au frisbee. 

Bref mon point de chute en fRance (pays maudit de la hype conservatrice) a été chez mon frère JP à Angers. Je dormais dans une pièce-placard. Il hébergeait aussi un certain Rico Maldoror (fondateur du label Gougnaf Mouvement, manager ou proche des Bästard, Deity Guns, personnage lyonnais haut en couleurs surtout celles des pilules magiques, une connaissance également de Despentes...). 

Il m'a à la bonne et me commandite de shooter en N&B - j'avais ramené un boîtier russe, un Zenith acheté à Dam à un toxico, appareil sans cellule, j'avais besoin d'une cellule externe pour mesurer la lumière, je développais moi-même, tirais les clichés dans les chiottes du studio du grand-frère et jettais beaucoup de papier photo (perle) noir cramé - il me demande donc de shooter un groupe américain appelé SHELLAC qu'il fait jouer miraculeusement dans une discothèque angevine2merde !!! 

Je connaissais évidemment Steve Albini de (re)nom - je lisais le fanzine Nineteen - mais il m'était inconnu de visage. Je me remémorais plus le regard noir de Lisa Germano ou la gueule d'ange du chanteur des Red House Painters (à qui j'ai parlé backstage au Melweg, un vrai connard). 

Un con au bar où je m'abreuve gratos, me dit qu'Albini est le batteur du groupe. Ni une, ni deux je le crois (il n'y avait pas Internet à l'époque...). Bilan : je passe mon temps à shooter le batteur ! Je rate magnifiquement Steve Albini. Rico m'a pardonné mais j'ai dormi chez mes parents le reste de mon court séjour angevin. 15 ans après, j'organisai le Festival de la Loose aux buttes Chaumont et Gonzaï couvrait l'événement (4 pages dans Technikart). Je vais fouiller dans mes cartons pour retrouver les photos du batteur : Todd Trainer. 

 Le Soir (journal belge) a fait la même erreur pour l'annonce du décès d'Albini :